Déclaration préliminaire à la conférence de presse suivant la décision de politique monétaire

Bonjour. Je suis ravi d’être ici avec la première sous-gouverneure Carolyn Rogers pour parler de notre décision de politique monétaire.

Aujourd’hui, le Conseil de direction a maintenu le taux directeur à 2,75 %.

L’incertitude reste élevée. L’économie canadienne s’est affaiblie, mais pas de façon marquée. Et les récentes données sur l’inflation sont légèrement plus fortes que prévu. Dans ce contexte, nous avons décidé de laisser le taux directeur inchangé le temps d’amasser plus d’informations sur la politique commerciale américaine et ses effets.

Le conflit commercial déclenché par les États-Unis reste le plus grand obstacle pour l’économie canadienne.

Depuis notre décision d’avril, l’administration américaine a continué d’augmenter et de baisser différents droits de douane. La Chine et les États-Unis ont réduit les droits de douane extrêmement élevés qu’ils s’étaient imposés, et des négociations commerciales bilatérales ont été entamées avec bon nombre de pays. L’extrême turbulence observée sur les marchés financiers en avril s’est modérée, et les pertes affichées sur les bourses ont été récupérées. Cependant, l’issue des négociations commerciales est très incertaine, les taux tarifaires se situent bien au-dessus des niveaux du début de 2025, et il y a encore des menaces de nouvelles mesures commerciales. Les hausses tarifaires supplémentaires imposées récemment par les États-Unis sur l’acier et l’aluminium mettent en évidence l’imprévisibilité de la politique commerciale américaine.

L’incertitude entourant les droits de douane américains s’étend aussi aux effets qu’ils auront. Lors de la décision d’avril, nous avons dit que nous allions porter une attention particulière à quatre facteurs, soit : dans quelle mesure les droits de douane plus élevés feront baisser la demande pour les exportations canadiennes; à quel point cela aura une incidence sur les investissements des entreprises, l’emploi et les dépenses des ménages; avec quelle ampleur et à quelle vitesse les hausses de coûts seront répercutées sur les prix à la consommation; et comment évolueront les attentes d’inflation.

Depuis, nous en avons appris un peu plus sur une partie de ces risques et incertitudes. Laissez-moi faire le point à ce sujet.

Jusqu’ici, l’économie américaine s’est montrée résiliente. Les entreprises ayant agi en anticipation de l’entrée en vigueur des droits de douane, les importations aux États-Unis ont été fortes, ce qui a pesé sur le produit intérieur brut (PIB) du pays au premier trimestre. Mais la demande intérieure est demeurée relativement élevée. De premiers indicateurs pour le deuxième trimestre laissent entrevoir un rebond de la croissance, du fait que les importations redescendent et que la demande intérieure continue d’augmenter.

Les importations américaines élevées ont profité au Canada, entraînant une hausse des exportations d’ici. Cela a stimulé la croissance du PIB canadien au premier trimestre, qui s’est établie à 2,2 % – soit un taux légèrement plus élevé que ce qu’anticipait la Banque. La composition de la croissance cadrait essentiellement avec nos prévisions. La progression des exportations et des stocks a été forte, mais celle de la demande intérieure finale est restée à peu près stable. Les dépenses élevées en machines et matériel ont soutenu la croissance des investissements des entreprises davantage que prévu. Après avoir été très vigoureuse au quatrième trimestre, la croissance de la consommation a ralenti, mais a maintenu un certain rythme malgré une baisse marquée de la confiance des consommateurs. L’activité sur le marché du logement a reculé sous l’effet d’une baisse importante des reventes, et les dépenses publiques ont aussi diminué.

Le marché du travail s’est affaibli, les pertes d’emploi étant concentrées dans les secteurs axés sur le commerce extérieur. Le taux de chômage est monté à 6,9 % en avril. Jusqu’à présent, l’emploi a tenu le coup dans les secteurs qui dépendent moins des exportations. Toutefois, les entreprises nous disent généralement qu’elles prévoient réduire leurs embauches.

L’activité économique ayant profité du devancement des exportations et de l’accumulation de stocks au premier trimestre, elle devrait être beaucoup plus faible au deuxième trimestre. Face aux droits de douane américains et à l’incertitude accrue, il y a eu une certaine résilience du côté des dépenses des familles et des entreprises canadiennes. Mais celles-ci resteront probablement prudentes, ce qui laisse présager que les dépenses intérieures resteront modestes.

Il est encore trop tôt pour voir les effets directs des mesures de rétorsion tarifaires dans les données sur les prix à la consommation. Mais on voit clairement l’incidence du retrait de la taxe sur le carbone pour les consommateurs. En effet, cette mesure a retranché 0,6 point de pourcentage de l’inflation en avril, principalement en faisant baisser les prix de l’essence. Résultat : l’inflation globale est descendue à 1,7 %. L’effet du retrait de cette taxe se fera sentir dans le taux de variation sur douze mois de l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation pour les onze prochains mois, avant de disparaître en avril 2026.

Abstraction faite des taxes, l’inflation est passée de 2,1 % en mars à 2,3 % en avril, ce qui est légèrement plus fort que ce que nous avions prévu. Les mesures de l’inflation fondamentale privilégiées par la Banque, ainsi que d’autres mesures de l’inflation sous-jacente, ont augmenté en avril. Bien que l’inflation montre une certaine volatilité inhabituelle, ces mesures semblent indiquer que l’inflation sous-jacente pourrait être plus forte que nous le pensions. La hausse de l’inflation fondamentale s’explique en partie par la montée des prix des biens, y compris des aliments, et pourrait refléter les effets des perturbations commerciales. Beaucoup d’entreprises disent qu’elles font déjà face à des coûts plus élevés du fait qu’elles doivent trouver de nouveaux fournisseurs et se tailler une place sur de nouveaux marchés. La Banque surveillera de près les mesures de l’inflation sous-jacente pour analyser l’évolution des pressions inflationnistes.

La Banque suit aussi attentivement les attentes d’inflation. En avril, nous avions rapporté que les consommateurs et les entreprises s’attendaient à une hausse des prix en raison des droits de douane, tandis que les attentes d’inflation à long terme demeuraient bien ancrées. De récentes enquêtes indiquent encore que les consommateurs se préparent à une montée des prix et que de nombreuses entreprises ont l’intention de répercuter sur leurs clients les coûts liés aux droits de douane.

Le Conseil de direction va continuer d’analyser l’évolution et la force des pressions sur l’inflation – celles à la baisse dues à l’affaiblissement de l’économie et celles à la hausse découlant de la montée des coûts.

Pour cette décision, il y avait un consensus clair pour laisser le taux directeur inchangé afin d’amasser plus d’informations. Les avis étaient plus partagés sur la trajectoire du taux directeur. Dans l’ensemble, les membres du Conseil étaient d’avis qu’il pourrait être nécessaire de baisser le taux directeur si les droits de douane américains et l’incertitude font ralentir l’économie et si les pressions sur l’inflation découlant des coûts sont maîtrisées.

Vu l’incertitude hors du commun, le Conseil procède avec prudence, en portant une attention particulière aux risques. Cela implique d’être moins tournés vers l’avenir que d’habitude.

Notre priorité est de préserver la confiance des Canadiennes et Canadiens dans la stabilité des prix pendant cette période de bouleversements mondiaux. Nous continuerons de soutenir la croissance économique tout en veillant à ce que l’inflation reste bien maîtrisée.

Sur ce, la première sous-gouverneure et moi répondrons avec plaisir à vos questions.

La Banque du Canada maintient le taux directeur à 2¾ %

La Banque du Canada a annoncé aujourd’hui qu’elle maintient le taux cible du financement à un jour à 2,75 %. Le taux officiel d’escompte s’établit à 3 %, et le taux de rémunération des dépôts, à 2,70 %.

Conférence de presse : Annonce concernant le taux directeur – Juin 2025

Annonce concernant le taux directeur – Conférence de presse donnée par le gouverneur Tiff Macklem et la première sous-gouverneure Carolyn Rogers. (vers 10 h 30, heure de l’Est)