Introduction
Merci, Bill, pour cette aimable présentation. Et merci de m’avoir invitée à prendre la parole devant vous aujourd’hui.
C’est toujours un plaisir d’être à Toronto. C’est là que j’ai fait mes études de premier cycle et de maîtrise, juste au nord d’ici, à l’Université de Toronto. J’ai de bons souvenirs de mes journées passées au Buttery et de mes visites occasionnelles à la Brunswick House et au Duke of York. Mais je ne suis pas ici pour parler de moi…
Je suis très heureuse de pouvoir prononcer la conférence annuelle David Laidler, nommée en l’honneur de M. Laidler et de ses nombreuses contributions à la pensée économique. Il a laissé une empreinte indélébile sur la politique monétaire de l’Amérique du Nord, et plus particulièrement du Canada. Il a notamment écrit deux livres primés avec Bill Robson.
À ce propos, je suis ravie d’être à l’Institut C.D. Howe. Vos écrits sur la politique économique, dont la réputation n’est plus à faire au pays, sont depuis longtemps une ressource utilisée par la Banque. J’ai aussi eu le plaisir de collaborer avec votre organisation lors d’ateliers visant à débattre et à traiter d’enjeux économiques importants.
Vous savez que la Banque fixe le taux directeur huit fois par an à des dates d’annonce préétablies, comme elle l’a fait hier. Mon intervention tombe donc à point nommé.
Pour la décision d’hier, le Conseil de direction a maintenu le taux directeur à 2,75 %.
Voici le contexte qui a mené à cette décision.
Le conflit commercial déclenché par les États-Unis reste le plus grand obstacle pour l’économie. L’incertitude demeure élevée.
L’économie canadienne a ralenti, sans s’être sérieusement affaiblie.
Et les dernières données sur l’inflation indiquent une certaine fermeté.
Ces éléments cadrent généralement avec l’avis formulé la semaine dernière par le Conseil de politique monétaire de l’Institut, qui considérait que la Banque devrait abaisser le taux directeur de 25 points de base.
Pour prendre la décision d’hier, nous avons bien sûr examiné des sources de données traditionnelles de Statistique Canada. Les rapports de cette agence sur des questions comme l’inflation, l’emploi et le logement sont essentiels pour comprendre la conjoncture économique récente. Ces données nous donnent une idée d’ensemble, mais pas forcément tous les détails. Et nous voulons être en mesure de tout voir.
Aujourd’hui, j’aimerais donc vous expliquer comment nous découvrons de nouvelles façons d’éclairer la conduite de la politique monétaire. Nous avons notamment recours à des données non traditionnelles et à des données d’enquête, et nous menons d’importantes activités de rayonnement auprès de la population.
Dans le livre Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, Atticus Finch dit : « Tu ne comprendras jamais aucune personne tant que tu n’envisageras pas la situation de son point de vue. » Et c’est vrai. Les conversations que mes collègues et moi avons avec les particuliers et les entreprises nous permettent de voir au-delà des données – et de tenir compte du point de vue des gens.
Élargir la collecte d’information
Comme je l’ai dit plus tôt, les données macroéconomiques traditionnelles donnent une vue d’ensemble. Elles rendent compte de segments entiers de l’économie. Parfois, cela signifie que nous ne percevons pas l’effet des conditions économiques tel qu’il se fait sentir par différents ménages et entreprises.
De plus, les données traditionnelles ont tendance à être rétrospectives : elles mesurent ce qui s’est déjà passé. Elles conviennent mieux pour établir des prévisions et expliquer des situations que nous avons déjà vécues.
Les enquêtes et les consultations de la Banque auprès des Canadiennes et des Canadiens nous donnent un aperçu de leurs projets de dépenses et d’investissement. Nous en apprenons davantage sur leurs attentes à l’égard de l’inflation et de l’activité économique. Ces résultats sont essentiels pour nos délibérations.
Quand nous élargissons les types d’information pris en compte dans nos décisions, nous obtenons une vision plus complète des effets d’une variation du taux directeur sur les consommateurs et les entreprises partout au pays.
En résumé, cet éventail plus large d’information nous aide à prendre de meilleures décisions.
Fait tout aussi important, échanger avec la population canadienne nous aide à renforcer la confiance et la crédibilité auprès des personnes que nous servons. Quand les gens font confiance à la Banque en tant qu’institution et qu’ils voient que nous avons leurs intérêts à cœur, cela crée un environnement qui favorise une transmission efficace de la politique monétaire.
En effet, lorsque la population s’attend à ce que nous respections nos engagements, cela facilite les choses pour que nos mesures aient l’effet voulu. Et cet effet, bien sûr, c’est la stabilité des prix, qui favorise la prospérité économique et financière du pays et de sa population à long terme.
Sources de données non traditionnelles
J’aimerais maintenant parler de certaines des façons dont la Banque a élargi ses sources d’information au fil des ans. Je vais commencer par expliquer pourquoi nous utilisons des sources de données non traditionnelles.
Ce qui s’est passé durant la pandémie de COVID-19 en est un bon exemple.
Avant la pandémie, nous n’avions pas de données ou de modèles permettant de faire face à une crise sanitaire mondiale qui coûterait des vies et des emplois. Mais en mars 2020, les économies du monde entier ont été paralysées. Et la situation évoluait très vite.
Penchons-nous sur ce qui s’est passé avec les voyages et les sorties au restaurant. La demande de services comme la restauration, le transport aérien et l’hôtellerie a été la première à chuter.
Statistique Canada produit des données mensuelles sur les ventes dans les bars et les restaurants qui sont utiles en temps normal. Mais au début de la pandémie, ces données rétrospectives ne montraient pas que la situation se détériorait rapidement. La Banque s’est donc tournée vers des données publiées plus fréquemment – comme les réservations de restaurant et de billets d’avion et les transactions par carte de crédit – pour évaluer le comportement d’achat des consommateurs en temps réel.
Les offres d’emploi provenant de sites Web comme Indeed constituaient une autre source utile de données non traditionnelles au printemps 2020. Ces données nous montraient la demande de nouveaux travailleurs dans les entreprises partout au pays, et elles complétaient bien les données de l’Enquête sur la population active de Statistique Canada. En effet, cette enquête nous permettait de connaître l’état du marché du travail au cours du mois précédent, tandis que les données en temps réel nous présentaient un aperçu des plans d’embauche des entreprises.
Et aujourd’hui, face à un conflit commercial mondial, nous continuons d’utiliser des données non traditionnelles, et nous le faisons même davantage. Par exemple, nous examinons différents indicateurs pour compléter notre analyse des répercussions tarifaires, comme le nombre de camions qui traversent la frontière et de navires entrants et sortants dans les ports canadiens et américains.
Personne ne sera surpris d’apprendre que les chiffres ne sont pas encourageants. À titre d’exemple, le nombre de camions qui traversent la frontière – tant vers le Canada que vers les États-Unis – a fortement chuté en avril.
Ce type d’information est inestimable en période de grande incertitude économique, comme celle que nous connaissons aujourd’hui.
Enquêtes auprès de la population canadienne
Passons maintenant à un autre outil important : les enquêtes.
Comme d’autres banques centrales, la Banque du Canada mène un certain nombre d’enquêtes auprès du secteur financier1. Les résultats de ces enquêtes nous renseignent sur des questions importantes, telles que les conditions de prêt, ainsi que l’offre et la demande de crédit. Nous obtenons aussi de précieux renseignements sur la résilience du système financier et les risques auxquels il est exposé. De plus, nous consultons des spécialistes des marchés financiers pour connaître leur point de vue sur la trajectoire de l’économie et de l’inflation.
Mais aujourd’hui, en parlant des enquêtes, je veux surtout montrer comment nos bureaux régionaux éclairent nos délibérations sur la politique monétaire en consultant les ménages et les entreprises.
Depuis la fin des années 1990, la Banque élargit son rayonnement dans les diverses régions qui composent ce grand pays. Elle a notamment ouvert des bureaux régionaux et sondé les entreprises et les consommateurs sur leurs perspectives économiques. Le personnel de nos bureaux régionaux est bien placé pour renforcer nos liens avec les principales parties prenantes locales, comme les entreprises, les administrations publiques, les établissements d’enseignement et les organismes communautaires.
À l’heure actuelle, les bureaux régionaux de la Banque mènent trois grandes enquêtes macroéconomiques : l’enquête sur les perspectives des entreprises2, Le Pouls des leaders d’entreprise3 et l’enquête sur les attentes des consommateurs au Canada4.
J’y reviendrai plus en détail dans un instant. Dans l’ensemble, ce genre d’enquêtes permettent d’atteindre trois grands objectifs.
Tout d’abord, elles nous aident à orienter nos perspectives pour l’économie et l’inflation. Les entreprises et les particuliers nous disent comment ils se sentent, ce qui nous permet de mesurer leur niveau de confiance actuel. Nous les sondons également sur leurs attentes quant à l’évolution des prix et de leurs dépenses.
Ces enquêtes donnent à la Banque une vision prospective de l’activité économique, de la demande, des pressions exercées sur la capacité de production et de l’inflation. Et cette vision est particulièrement utile comme premier aperçu de la façon dont l’économie réagit en période de grande incertitude, comme celle qui entoure le conflit commercial en cours.
Les enquêtes mettent aussi en lumière les tendances qui pourraient se dessiner sous la surface. Elles nous aident à comprendre les changements de comportement qui ne se reflètent pas toujours dans les rapports de données agrégées, du moins pas immédiatement.
Enfin, ces enquêtes nous aident à recueillir une multitude de points de vue sur la situation économique actuelle aux quatre coins du pays.
Notre économie nationale est composée de diverses économies régionales. Les conditions économiques peuvent varier d’une région à l’autre, et les régions peuvent réagir différemment aux reprises et aux ralentissements généralisés5. Les données d’enquête nous donnent une idée plus claire des différentes façons dont les ménages et les entreprises vivent la situation économique.
Je vais maintenant vous parler de chacune de ces enquêtes.
L’enquête sur les perspectives des entreprises est une enquête trimestrielle menée auprès d’entreprises de tout le pays. Elle existe depuis 1997, ce qui nous donne un ensemble de données riche et étendu pour pouvoir faire des comparaisons.
Le personnel de nos bureaux régionaux rencontre des leaders d’entreprise locaux pour connaître leur point de vue sur l’économie. Nous posons des questions sur leurs attentes à l’égard des ventes et de la demande, ainsi que sur leurs intentions d’investissement. Nous sondons leur opinion sur les pénuries de main-d’œuvre, l’embauche et les salaires. Nous cherchons aussi à connaître leurs perspectives sur les coûts et les prix, de même que sur l’inflation dans l’ensemble de l’économie. Nous recueillons ainsi un large éventail de points de vue sur les perspectives économiques des entreprises.
Par exemple, les résultats de l’enquête sur les perspectives des entreprises menée par la Banque au quatrième trimestre de 2021 nous ont permis de mieux comprendre comment la pandémie de COVID-19 touchait les entreprises6. Pour la première fois depuis le début de la pandémie, nous avons constaté que les entreprises prévoyaient répercuter sur leurs clients les hausses de coûts découlant des pressions sur les chaînes d’approvisionnement. Elles avaient conclu que les clients comprenaient ces pressions et étaient prêts à accepter des augmentations de prix.
Plus récemment, les entreprises nous ont dit que l’incertitude entourant les droits de douane les touchait de diverses façons, notamment en faisant baisser la demande des clients commerciaux qui allaient être directement touchés par les droits de douane.
Il y a aussi le Pouls des leaders d’entreprise, notre plus récente enquête, créée en 2021. C’est un court questionnaire en ligne qui sert à évaluer chaque mois les attentes des entreprises concernant la croissance des ventes et de l’emploi. On leur demande également comment elles perçoivent les risques entourant leurs perspectives d’affaires, en plus de poser certaines autres questions selon la conjoncture.
Le Pouls des leaders d’entreprise est un moyen flexible et agile de suivre une situation en évolution. Il complète l’enquête sur les perspectives des entreprises en sondant les entreprises au bon moment quant aux effets d’un changement rapide du contexte économique.
D’ailleurs, le Pouls des leaders d’entreprise s’est avéré très utile pour surveiller l’incidence de la situation observée au sud de la frontière. Par exemple, déjà en novembre 2024, les entreprises signalaient une hausse de l’incertitude et de leurs attentes d’inflation. En décembre, on commençait aussi à noter une baisse de leur confiance, avant même l’assermentation de la nouvelle administration américaine.
Cette tendance à la baisse s’est poursuivie au premier trimestre (graphique 1). Les entreprises ont indiqué qu’elles reportaient, voire abandonnaient complètement leurs plans d’investissement et d’embauche. Chez les exportateurs, les perspectives de vente ont également beaucoup diminué ces derniers mois (graphique 2).
La dernière enquête dont j’aimerais parler est celle sur les attentes des consommateurs au Canada. C’est une enquête trimestrielle qui sonde les ménages sur leurs perspectives d’emploi, leur santé financière et leurs attentes d’inflation. On y aborde aussi des sujets auxquels s’intéresse la Banque à ce moment. Les données sont réparties selon certaines caractéristiques, comme l’âge, le lieu de résidence, le revenu et le niveau de scolarité.
Pendant et immédiatement après la pandémie, cette enquête a permis à la Banque de mieux analyser les différences dans les habitudes de consommation et d’épargne des ménages. Chez les particuliers, la pandémie – avec les hausses d’inflation et de taux d’intérêt qui ont suivi – a eu des effets très différents selon les segments de la population. J’ai fait un discours à ce sujet à l’Université de Regina à l’automne 2023; je vous encourage à le lire7.
Plus récemment, au premier trimestre de 2025, les résultats de l’enquête sur les attentes des consommateurs au Canada ont montré un vent de solidarité quant à l’achat de biens et services canadiens, ce qui pourrait réduire les importations canadiennes en provenance des États-Unis.
L’enquête sur les attentes des consommateurs au Canada nous a permis de voir comment les tensions commerciales avec les États-Unis touchaient certaines parties de la population canadienne plus que d’autres. Dans les secteurs qui dépendent des exportations vers les États-Unis, les gens se préoccupent de plus en plus de leur sécurité d’emploi. Ils se disent plus portés à réduire leurs dépenses en biens durables, comme les meubles et les électroménagers, et en biens non essentiels, comme les repas au restaurant et les vacances.
Et les politiques tarifaires pourraient influer sur les prix à la consommation. En effet, puisque les droits de douane sont sur toutes les lèvres, on a récemment vu augmenter les attentes d’inflation des consommateurs sur un horizon d’un ou deux ans (graphique 3).
Consultations régionales spéciales
Je vais maintenant parler des consultations qui sortent du calendrier habituel des enquêtes la Banque et qui varient surtout selon les enjeux de l’heure.
Depuis de nombreuses années, le gouverneur et d’autres cadres supérieurs de la Banque rencontrent régulièrement des leaders de différents secteurs. Plus récemment, des membres du Conseil de direction ont parlé avec des représentants du secteur de l’automobile, ainsi qu’avec d’autres fabricants et exportateurs. Nous voulions connaître leur point de vue quant aux effets du conflit commercial dans leurs secteurs et à leurs perspectives d’avenir.
La Banque tient également des consultations spéciales un peu partout au pays pour compléter les ensembles de données traditionnels et ses enquêtes standard.
Par exemple, je vous ramène à la décision du taux directeur qui a été prise en mars 2025.
On évoluait alors dans un contexte vraiment chaotique. Le Conseil de direction voulait mieux comprendre comment l’incertitude entourant la politique commerciale américaine et les contre-mesures canadiennes influaient sur l’économie.
Pour éclairer notre décision concernant le taux directeur, nous avons énormément tenu compte des résultats de nos trois enquêtes standard. Mais nous avons aussi mené des consultations supplémentaires auprès d’entreprises et d’associations sectorielles particulièrement touchées par les tensions commerciales. Cela n’aurait pas été possible sans les relations solides que le personnel de nos bureaux régionaux a tissées et entretenues au fil des ans.
Nous avons également tenu compte de ce type de consultations pour notre décision de taux hier. Je vais vous donner un aperçu de ce que nous avons entendu.
Dans l’ensemble, par rapport aux échos reçus plus tôt cette année, les entreprises trouvaient beaucoup moins probable que leurs scénarios les plus pessimistes se concrétisent. Il y avait moins d’anticipations catastrophiques, bien que l’incertitude reste élevée. Mais les entreprises ont commencé à constater des effets concrets sur leurs résultats, et elles ont du mal à formuler des prévisions.
La plupart des entreprises s’attendent à ce que l’activité ralentisse à court terme, ce qui met des emplois en péril. En outre, elles indiquent que leurs coûts augmentent, ce qui signifie probablement qu’elles devront monter leurs prix à un certain moment.
C’est une information dont a tenu compte le Conseil de direction, entre autres données et analyses, pour décider hier de maintenir le taux directeur à 2,75 %.
Activités de rayonnement du Conseil de direction
Pour mon dernier exemple, j’aimerais maintenant parler d’une initiative qui me tient particulièrement à cœur.
Les membres du Conseil de direction ont intensifié le nombre de visites qui servent à s’informer, directement auprès des gens concernés, des conditions économiques dans les différentes régions du pays. Nous posons beaucoup de questions, et nous écoutons les gens nous raconter leur point de vue et leur expérience.
Parfois, ces rencontres régionales ont lieu quand un membre du Conseil de direction se rend dans une ville pour donner un discours public. D’autres fois, nous nous déplaçons seulement pour aller échanger avec la population et les entreprises locales.
L’an dernier, mes collègues et moi avons fait 16 visites de ce type, pour un total combiné d’environ 100 tables rondes, réunions bilatérales et consultations. En plus des entreprises, nous avons rencontré des personnes et des groupes de divers horizons, notamment des peuples autochtones, des syndicats, des responsables de la sphère publique, des associations vouées à l’amélioration commerciale et des organismes de services sociaux, entre autres.
Pendant mon séjour à Toronto, je vais échanger avec des représentants du milieu universitaire, d’un syndicat et d’une entreprise de transport maritime. Je vais également discuter avec la chef d’un programme de mentorat destiné aux jeunes entreprises de technologies et un leader dans le domaine du génie biomédical.
Les gens que je rencontre d’un bout à l’autre du pays me laissent une impression indélébile dans mon rôle au Conseil de direction de la Banque.
En écoutant directement les particuliers et les entreprises, je comprends mieux l’étendue des enjeux économiques. Les interactions en personne tissent une histoire autour de la conjoncture économique, en la portant au-delà des faits et des chiffres.
Durant mes déplacements, il est arrivé que certains témoignages soient annonciateurs de ce qui s’est manifesté plus tard dans les ensembles de données objectives. Par exemple, quand j’étais à Moncton plus tôt cette année, les entreprises m’ont dit que les expéditions vers les États-Unis avaient lieu plus tôt que ce qui était initialement prévu. Elles ont également signalé faire entrer plus de livraisons au Canada. On semblait donc constater que les exportateurs et les importateurs devançaient les expéditions et accumulaient des stocks avant l’imposition des droits de douane. C’est bien ce que les données officielles ont confirmé plus tard.
Les témoignages des gens aident aussi la Banque à saisir les difficultés du vrai monde, au-delà des données traditionnelles. Quand j’ai rencontré des personnes travaillant dans le secteur des technologies de l’information à Ottawa, on m’a dit que les entreprises avaient du mal à attirer des employés venant de l’extérieur de la ville en raison des frais de logement élevés. L’abordabilité a également été soulevée dans mes conversations avec les gens du secteur des services sociaux. Ils ont dit constater une augmentation du nombre de sans-abri et de personnes qui ont recours aux banques alimentaires.
Nos rencontres ont aussi l’avantage de nous aider à faire des liens. Si j’entends quelque chose dans la vallée du Fraser et ici à Toronto, c’est peut-être le signe d’une nouvelle tendance nationale à surveiller.
Mais je tiens à souligner que ce ne sont pas seulement les membres du Conseil de direction, comme moi, qui écoutent ainsi les gens. Chaque jour, notre personnel régional tisse des liens importants avec des particuliers et des entreprises. Leurs efforts dans diverses régions du pays méritent vraiment nos hommages.
Les commentaires que nous recevons nous aident réellement à comprendre comment une situation comme l’incertitude commerciale généralisée se répercute sur l’économie. Donc, si la Banque fait appel à votre organisation pour un sondage ou une visite, je vous encourage à accepter. Ceux et celles qui prennent le temps de nous rencontrer malgré leur horaire chargé ont toute notre reconnaissance.
Je vous donne peut-être l’impression qu’il y a des avantages d’un seul côté, mais j’ose espérer que les personnes avec qui nous discutons ressortent aussi de nos rencontres en étant mieux informées sur la façon dont la Banque du Canada travaille à leur service.
Nous savons que les dernières années ont été difficiles. Beaucoup de ménages et d’entreprises ont rencontré des difficultés importantes, étant donné que l’inflation a atteint des niveaux inégalés depuis des décennies. Les taux d’intérêt élevés qui ont été nécessaires pour ramener l’inflation à notre cible de 2 % ont également rendu les emprunts plus coûteux.
En fin de compte, les mesures de politique monétaire prises par la Banque ont rétabli la stabilité des prix, et nous avons pu abaisser notre taux directeur de 2,25 points de pourcentage depuis le printemps dernier.
Mais encore une fois, la population canadienne doit composer avec un avenir plus incertain. C’est important que les gens continuent de nous faire confiance pour garder la main ferme à travers ces turbulences. Nos activités de rayonnement contribuent justement à obtenir – et à garder – cette confiance.
Conclusion
Il est temps pour moi de conclure.
Avant de répondre à vos questions, je veux souligner que cette année marque le 90e anniversaire de la Banque. Voilà neuf décennies que nous favorisons la prospérité économique et financière du Canada et de sa population.
Nous n’avons pas toujours la vérité infuse, mais nous apprenons et nous nous adaptons constamment. C’est d’une importance vitale compte tenu du contexte actuel très incertain, où la situation semble parfois changer d’heure en heure.
En cette période d’incertitude, mes collègues et moi continuerons de sonder la population. Quand le Conseil de direction est mieux informé, il prend de meilleures décisions – pour vous et pour tout le pays.
Merci d’avoir pris le temps d’en apprendre plus sur le travail de la Banque du Canada, et sur la façon dont vos idées façonnent notre réflexion.
Je serais ravie de répondre à vos questions.
J’aimerais remercier Sarah Miller, Joshua Slive et Lena Suchanek pour leur aide dans la préparation de ce discours.
Information connexe
Discours : Institut C.D. Howe
Dialogue avec la population canadienne : La politique monétaire face aux réalités du quotidien — La sous-gouverneure Sharon Kozicki prononce un discours devant l’Institut C.D. Howe à Toronto (vers 12 h 35, heure de l’Est).